Sous le titre de Farces et moralités, Mirbeau a recueilli en 1904 six courtes pièces en un acte, représentées dans de petits théâtres. Ce sont des moralités, qui ont un objectif didactique avoué et invitent les spectateurs à tirer une leçon. Mais, en même temps, ce sont des farces, qui visent à distancier le spectateur, pour lui permettre d’exercer son jugement critique. Mirbeau y tourne en dérision tout ce qu’un vain peuple craint et révère (la loi, la propriété, la police, le pouvoir politique, la presse). Et il se livre à une démystification en règle des mythes de l’amour, de la démocratie, de la morale et du mariage. Il met également à nu la fonction mystificatrice du langage, portant ainsi la contestation au cœur même du système de domination de la bourgeoisie. Par ses Farces et moralités, Mirbeau se situe dans la continuité des farces de Molière et anticipe tout à la fois le théâtre didactique de Brecht, le théâtre rosse d’Anouilh et de Marcel Aymé, et le théâtre de l’absurde d’Ionesco.