Première grande pièce de Mirbeau, représentée au début de l’affaire Dreyfus, c’est une tragédie prolétarienne dont le sujet est proche de celui de Germinal, mais dont la leçon désespérée est bien différente. Œuvre surprenante, par son mélange détonnant de messianisme et de nihilisme, de réalisme et de symbolisme, de lucidité et de foi. Mirbeau y proclame le droit des ouvriers, non seulement au pain et au travail, mais aussi à la santé, à l’éducation et à la beauté. Et il y fustige tous les meneurs d’hommes, tous les « mauvais bergers », qui manipulent les masses, non seulement les patrons de droit divin prêts à les massacrer sans la moindre pitié et les politiciens bourgeois à leur solde, mais aussi les députés socialistes qui récupèrent les luttes des travailleurs et les leaders anarchistes qui les conduisent à la mort.